La vidéoprojection, c’est compliqué !

Introduction

Mon intention n’est nullement de vous décourager de débuter dans le monde merveilleux de la vidéoprojection, mais plutôt de vous mettre en garde et de vous faire comprendre que c’est un peu plus compliqué que ce que vous pensez. En effet, c’est moins simple que d’acheter une télévision, avec laquelle on obtient une belle image assez rapidement !

Quel est le problème me direz-vous ? Eh bien ce n’est pas un, mais plusieurs problèmes, que vous risquez de rencontrer si vous partez « la fleur au fusil », si vous ne vous y connaissez pas grand-chose. Le but de cet article est donc de passer au crible les principales difficultés lorsque l’on débute dans ce domaine.

Le placement du projecteur

Les projecteurs se partagent en deux catégories : ceux qui possèdent un lens-shift (dispositif de décalage de l’image) de grande amplitude et les autres.

Projecteurs disposant d’un lens-shift

Attention, je parle d’un vrai lens-shift, c’est-à-dire un dispositif permettant de déplacer l’image de manière importante (jusqu’à 50 cm et plus), pas du petit lens-shift équipant certains projecteurs DLP.

Ces projecteurs sont prévus pour être placés idéalement en face du centre de l’écran (au sens intersection des diagonales), par exemple en les posant sur une tablette murale, mais leur lens-shift leur permet en général presque n’importe quel placement, à condition de ne pas dépasser les limites du lens-shift.

Comment déterminer les limites d’un lens-shift ?

Prenons l’exemple du Sony VPL-VW270ES. Voici les données de son lens-shift :

  • + ou – 31% à l’horizontal
  • +85% ou -80% à la verticale

Si vous voulez une image de 3 mètres de base (1.69 mètres en hauteur pour le format 16/9), vous pourrez décaler l’image de 0.93 mètres (0.31 * 3 = 0.93) à gauche ou à droite par rapport au projecteur. Et vous pourrez la décaler de 1.44 mètres vers le haut (0.85 * 1.69 = 1.44), ou de 1.35 mètres vers le bas (0.80 * 1.69 = 1.35). Mais attention, les excursions limites ne permettent pas le cumul, autrement dit si vous décalez votre image de 0.93 mètres vers la gauche ou vers la droite, vous ne pourrez plus du tout la décaler à la verticale !

Le plus simple est de vous faire un schéma à l’échelle, suivant le modèle ci-dessus.

Projecteurs dépourvus de lens-shift (ou disposant d’un petit lens-shift vertical)

Pour ces machines, seulement deux placements sont possibles :

  • sur table basse,
  • au plafond et à l’envers.

Position table basse

Le projecteur est posé sur ses pieds, avec l’objectif légèrement en dessous du bas de l’image (15 à 20 cm en général). Le décalage entre l’objectif et le bas de l’image s’appelle l’offset, il est donné dans la notice et dépend en général de la taille de l’image.

Position « plafond »

Le projecteur est à l’envers (les pieds vers le haut), fixé sur un support plafond. Son objectif est légèrement au-dessus du haut de l’image (environ 15 à 20 cm en général). Là aussi la notion d’offset intervient.

Centrage horizontal

Que le projecteur soit en position table basse ou plafond, son objectif doit être centré horizontalement, au centimètre près !

Si le projecteur n’est pas placé idéalement, horizontalement et verticalement, l’image n’est pas rectangulaire mais en forme de trapèze ! Pour remédier à ce problème et rendre l’image rectangulaire, il faut faire appel à la correction trapézoïdale. En général, on essaye d’éviter ce genre d’astuce car elle entraîne inévitablement une perte de piqué, mais parfois on ne peut pas faire autrement, et cela reste acceptable si la correction de trapèze reste légère. Attention, certains projecteurs ne disposent pas de correction de trapèze, comme l’Optoma UHZ65, et dans ce cas on n’a pas droit à l’erreur, sous peine d’avoir une image en forme de trapèze !

La focale du projecteur

Pour faire simple, disons qu’il existe 4 catégories de focale : ultra-courte, courte, standard et longue. Je vais traiter le cas le plus courant, à savoir celui des focales standards. En général, le rapport de projection est alors compris entre 1.3 et 3. Il permet de calculer la largeur de l’image en fonction du recul du projecteur. Prenons un exemple, imaginons que vous souhaitiez une largeur d’image (on dit base image dans le jargon de la vidéoprojection) de 2 mètres, il va donc falloir éloigner l’objectif du projecteur par rapport à la toile de :

  • 1.3 * 2 = 2.6 mètres au minimum,
  • 3 * 2 = 6 mètres au maximum.

Retenons les formules suivantes :

  • Recul du projecteur = rapport de projection * base image
  • Base image = recul du projecteur / rapport de projection

L’environnement de projection

Après le placement du projecteur, l’environnement de projection est le deuxième grand problème à traiter.

Dans l’idéal la vidéoprojection est prévue pour être effectuée dans l’obscurité totale et dans une pièce très sombre (murs, plafond et sol) comme au cinéma. Et c’est là que les problèmes commencent car les personnes disposant d’une salle dédiée correspondant à ces caractéristiques sont rares. En effet, la plupart du temps, la projection se réalise en pièce de vie, comme un salon, un bureau ou une chambre, et dans ces conditions c’est compliqué de tout peindre en noir ! Mais la parade existe avec ce qu’on appelle les toiles techniques. Elles sont de couleur grise, et ont la particularité de contrôler la lumière, c’est-à-dire qu’elles vont beaucoup moins éclairer l’environnement, ce qui préserve le contraste. En France, les marques les plus connues sont Draper (toile React 3.0), Xtrem Screen (toiles Daylight), ScreenLine (toile Radiance), Screen Innovation (toiles Slate) et Elite Screen (Cinegrey 3D et 5D). Mais attention ces toiles sont chères, et les meilleures sont souvent les plus chères !

Et lorsque l’on n’a pas les moyens de s’acheter une toile technique, il faut éloigner l’image des zones produisant de la pollution lumineuse (plafond blanc, murs latéraux et sol), ou assombrir le voisinage de l’écran.

Xtrem Screen (toiles Daylight)

Screen Innovation (toiles Slate)

ScreenLine (toile Radiance)

Les effets d’arc-en-ciel des projecteurs mono-DLP

Les projecteurs mono-DLP produisent les couleurs grâce à une roue chromatique. Cela peut entraîner la vision de flashs lumineux de couleurs qui peuvent faire penser à de petits arc-en-ciels dans l’image. Les personnes très sensibles à ce phénomène sont rares (moins de 10% de la population), et la plupart du temps on finit par s’y habituer avec le temps (accoutumance), mais pour les plus sensibles il est possible que les effets d’arc-en-ciel soient rédhibitoires !

Si vous êtes en train de vous demander si vous êtes sensible au phénomène, et si vous vous dites que vous n’en avez jamais vu au cinéma, c’est normal car les projecteurs utilisés sont des Tri-DLP, qui n’utilisent pas de roue chromatique. Pour évaluer votre sensibilité, il n’y a pas d’autres moyens que de tester, en allant voir fonctionner un projecteur mono-DLP.

Toutefois, ce phénomène a été beaucoup réduit depuis quelques années, en faisant tourner plus vite les roues chromatiques, et en utilisant des roues RVBRVB. Mais il peut y avoir des exceptions, comme les projecteurs Optoma UHZ65 ou Acer VL7860, pour lesquels l’effet d’arc-en-ciel est assez présent.

La luminosité

En général, le problème qui peut se poser est de manquer de luminosité, pour la 3D ou pour le HDR, mais plus globalement il faut savoir adapter la taille de l’écran à la puissance lumineuse du projecteur, et inversement.

Voici comment calculer le flux lumineux nécessaire :

Flux lumineux = PI * surface de projection * luminance cible

Flux lumineux : en lumens

Surface de projection : en m²

Luminance cible : en candelas/m²

PI =  π

Prenons un exemple, en SDR la luminance cible des pics lumineux est de 48 cd/m². Calculons le flux lumineux nécessaire pour 3 mètres de base (surface de 5 m² en format 16/9).

Flux lumineux = 3.14 * 5 * 48 = 753.6 lumens

Mais attention, il faut prendre de la marge car la luminosité va décroître lorsque la lampe va vieillir. Pour ma part je double, et je dis qu’il faut un projecteur d’environ 1500 lumens pour éclairer correctement un écran de 3 mètres de base, pour tenir compte de l’usure de la lampe dans le temps. En outre, le fait de doubler la valeur nécessaire permet d’avoir un HDR convaincant, tout du moins avec une lampe neuve, car en HDR la luminance cible est de 100 cd/m².

Attention, on a besoin de plus de lumens en pièce de vie qu’en salle dédiée ! Certes, en pièce de vie réduire la luminosité permet de diminuer la pollution lumineuse, mais ce n’est pas la bonne solution, à part si vous souhaitez disposer d’une image anémique. Non, en pièce de vie la meilleure solution reste la toile technique, associée à un projecteur lumineux.

La luminosité

Contrairement au cas d’une TV, il est rare qu’en vidéoprojection les électroniques (ampli, lecteur Blu-Ray, box TV, etc.) se trouvent à proximité du vidéoprojecteur, il va donc souvent falloir utiliser un câble HDMI de grande longueur (5 mètres et plus). Et c’est là que les problèmes commencent, surtout en ce qui concerne l’Ultra HD et le HDR qui nécessitent de plus grands débits que le Full HD.

A l’heure actuelle, pour les grandes longueurs, il est peu pertinent de se passer des câbles HDMI à fibre optique. Avec ces derniers, étant donné que c’est une fibre optique qui relie les deux connecteurs HDMI, non seulement tout passe, même les signaux les plus exigeants, mais en plus avec une meilleure qualité, je l’ai constaté à plusieurs reprises ! Certes, ces câbles sont en général plus chers que ceux composés de brins en cuivre, ainsi ils dépassent souvent 100 €, mais l’investissement vaut souvent le coup !

Et pour les petites longueurs (moins de 5 mètres) ? Certes, on ne trouve pas toujours des câbles HDMI optique pour des longueurs de 1 ou de 2 mètres par exemple, mais il existe des câbles HDMI fibre de carbone qui font un excellent travail ! En tout cas, en ce qui me concerne, j’ai tendance à penser que les câbles HDMI avec brins en cuivre font un peu partie du passé, alors s’il s’agit d’une nouvelle installation autant partir sur des câbles à fibre optique ou à fibre de carbone, même pour les petites longueurs, comme ça on évite toutes les instabilités, notamment celles générées par le HDR, et on est paré pour l’avenir.

Câble HDMI fibre de carbone

Conclusion

La vidéoprojection a un « côté magique » que n’aura jamais un téléviseur (ou un mur d’image), mais c’est plus compliqué à mettre en œuvre comme vous avez pu vous en rendre compte en lisant cet article. Alors si vous voulez éviter les plus grosses bêtises, qui pourraient vous contraindre à ramener votre projecteur au magasin, commencez déjà par vous renseigner ou faites appel à des personnes plus chevronnées que vous. Mais attention, les conseils donnés par les vendeurs en magasin ne sont pas toujours les meilleurs car ils sont en général assez ignorants dans le domaine. En effet, la vidéoprojection étant un marché de niche, très peu de gens ont les compétences pour vous renseigner correctement.

Cet article a été rédigé par Hervé Thiollier – Consultant / installateur home cinéma – Calibreur vidéo – Revendeur de matériel home cinéma toutes marques.

Site web : ht-consulting.pro

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